Le maquis que l’Histoire avait oublié
 

La réaction allemande

Le 30 janvier 2007, par Gerard,

L’avance rapide des troupes débarquées en Normandie, puis le débarquement de Provence (à partir du 15 août) décident le haut état-major allemand à utiliser le massif des Vosges comme ultime rempart de ses frontières "naturelles". Ce qui implique de renforcer le "Schutzwall West" et de "nettoyer" ses arrières

C’est ainsi que mi-août le haut commandement SS de Strasbourg ordonne à l’état-major d’Epinal de mettre immédiatement sur pied un plan d’anéantissement préventif des maquis vosgiens, de celui de la haute vallée du Rabodeau principalement et pour cause [1]. Une volonté personnelle d’Himmler, bientôt totalement "débridée" par le décret d’Hitler du 2 septembre qui lui donnera les quasi pleins pouvoirs opérationnels sur la région [2], maintenant omnipotent, omniprésent, totalement incontournable et plus pressant encore depuis l’attentat de von Stauffenberg contre Hitler (20 juillet 44) [3] . C’est le fondement de l’opération "Wald Fest" (ou Waldfest) [4]

Cette opération telle que considérée comme un tout démarré mi août - coïncidence avec le parachutage de l’avant-garde de Loyton non due au hasard - durera un peu plus de 3 mois (jusqu’au 22 novembre, jour de la Libération d’ici). Progressivement articulée autour des 2 BDS * Alsace-Bade et France et directement contrôlée par l’état-major de Himmler par le biais de Alphonse Uhring. Pour en savoir plus, se reporter à l’article dédié dénommé L’Aktion Wald Fest. Pourquoi et comment, en particulier au 1er document PDF de bas de page "Dossier d’enquête Missing Parachutists... ". Cliquer

* BDS signifie "Befehlshaber der Sicherheits Polizei und der Sicherheits Dienst", en Français Commandement supérieur des polices de sécurité Sipo et SD d’un territoire


Une "avant première" démarre ici le 16 août [5]. Elle vise le GMA Vosges et la Résistance de Moussey et environs (il y a eu en effet là, le 13 août à la Côte du Mont, le parachutage des avant-gardes de l’Opération Loyton et des premières armes destinées au Maquis local). Elle comprend 2 étapes principales [6]

Etape du 17 août :

Vaste opération militaire de "ratissage", alliant Einsatz Kommandos, Feld Gendarmerie et Wehrmacht. Le but est de briser la résistance vosgienne du Massif du Donon : briser le GMA Vosges, barrer la montée en puissance du 1er RCV FFI, mettre la main sur les maquisards locaux, capturer les parachutistes du SAS, récupérer les armes acheminées au Jardin David lors du parachutage du 13 août. Illustration :

- 3 formations allemandes, parties de la vallée de Celles, du Donon et de Moussey, convergent vers les Bois Sauvages
- Etonnamment bien informées, elles se dirigent directement vers le secteur Lac de la Maix/Jardin David, position du GMA Vosges tenue à ce moment précis à la Fontaine des Colas Lorrains par la 2ème centurie de l’aspirant Lefranc alias "Félix", et non plus par la 1ère du sous-lieutenant Ricatte alias "Jean-Serge", objectif originel (celle-ci n’était plus à l’endroit transmis par les dénonciateurs mais récemment "déménagée" au col des Herrins...) [7]. S’y trouve en accompagnement une forte équipe de parachutistes Anglais (2ème SAS, F Phantom dont captain Hislop, SOE Jed Jacob dont sergeant Seymour), regroupée autour du captain "Goodfellow" (Robert de Lesseps, Français bilingue) et guidé par des maquisards locaux. C’est là et dans ces moments là en pleine forêt, que se tiendra une conférence d’état-major "interalliée" entre le "staff" SAS et le "staff" GMA Vosges + colonel Gilbert Grandval, patron de la "Zone C"...
- Bien que prévenus par le garde chasse Albert Freine, les hommes tardent à se replier, se dispersent et ne peuvent tous éviter l’affrontement. On compte plusieurs morts, blessés et capturés lors de la débandade. Parmi d’autres, les parachutistes britanniques décident de se replier par groupes séparés, seuls ou accompagnés d’hommes du cru, vers Vexaincourt, Allarmont, Moussey... Un principal "chemin" vers Moussey sera maison forestière des Chavons, la "Digue", basse de Lieumont, le Harcholet, où les assisteront des habitants [8]...
- Des effets personnels sont "oubliés" sur place. Parmi ceux ci, au moins 2 (en toute logique 3) sacoches d’officiers d’état-major du GMA ! C’est là, parmi les plans et projets du GMA Vosges, que sera trouvée le lendemain 18 une liste de noms dite "La liste oubliée" [9]. Funestes conséquences, dans les heures à venir... et par la suite. La liste des morts parle (document PDF de page)

Etape du 18 août :

Vaste "opération de police", alliant elle aussi Einsatz Kommandos et Wehrmacht. Le but est de conclure l’opération de la veille en mettant la main sur les gens des villages d’ici qui "sont du maquis" (les rescapés de l’opération de la veille, les participants du parachutage du 13 août, d’autres "terroristes" si possible). Illustration par l’exemple de Moussey, le village le plus touché dans cette affaire :

- Ce vendredi, tôt le matin (environ 6h 30), des troupes de la Wehrmacht investissent le village et le SD installe son quartier général à la « Crèche »
- L’organisateur délégué sur place (Lt Raimond Fischer, Alsacien travaillant pour le BDS Alsace-Bade... ) exige 10 otages. Jules Py, le maire, 8 conseillers municipaux et Achille Gasmann, le curé, se désignent et sont enfermés dans les sous-sols (les noms dans document PDF ci dessous "Témoignage de J. P. Houel")
- Puis tous les hommes (a priori de 17 à 60 ans) sont convoqués par l’appariteur du village Louis Marchal (dit "le Ziquet") placé sous bonne garde dans un side-car allemand, ratissés et rassemblés à la « Crèche »
- Vers midi, faute de trouver des preuves suffisantes, tout le monde est relâché
- Vers 17 heures, tous les hommes sont à nouveau convoqués au même endroit. Parce que, entre temps, la "liste oubliée" évoquée ci-avant a été établie, au moins dans son essentiel (voir Note 7)
- Les suspects sont interrogés et enfermés sur place, aucun ne "parle"
- Le lendemain matin, 52 hommes dont toute la brigade de gendarmerie et une partie des gardes forestiers sont emmenés par camions à destination du camp de Schirmeck (certains transiteront par les officines du SD que sont le "Château de Belval" et la "Maison Barthélémy" de Saales) [10]. Ils y retrouveront Georges Evrard, arrêté individuellement à sa maison forestière de Moussey-Chavons, emmené à Allarmont, et rescapé (il n’a jamais su pourquoi) de l’exécution des hommes enfermés au "local des Pompes". René Valentin, le chef de la 6ème centurie, seulement "pris" le 23, les y rejoindra [11]
- Ils subissent là interrogatoires et tortures. Aucun ne « parle », et 44 sont désignés "pour les camps" [12]. 36 du village n’en reviendront pas (39, "clandestins" compris)

Parmi d’autres conséquences, 14 hommes sont capturés les 17 et 18 août et enfermés à la salle des Pompes d’Allarmont. 10 seront extraits "par étapes" le 19 pour être exécutés dans les bois environnants [13]. Les 4 derniers dont Georges Evrard seront conduits à Schirmeck

3 des 4 parachutistes Anglais capturés dans l’opération seront exécutés "dans la foulée" et 1 sera gardé prisonnier [14]

Environ 40 hommes sont triés et "mis à part" le 23 août
- 35 (17 de Moussey dont 3 "clandestins", 5 de Belval, 4 de Le Saulcy... ) sont montés de Schirmeck au Struthof par camion le soir du 1er septembre, en même temps que 106 résistants dont 15 femmes du "Réseau Alliance" (témoignage dans dernier document PDF de bas de page). Tous sont conduits au block crématoire et exécutés dans la nuit, l’effroyable "nuit du 1er au 2 septembre" : 141 exécutions "à la chaîne" !
- Au moins 4, Maurice Fister de Belval, Camille Léonard de Vexaincourt, René Josselin, maquisard de Le Saulcy Belval venu de Lyon, Jacques Cuny de Raon sur Plaine, sont morts au camp de Schirmeck des tortures infligées au cours des interrogatoires pratiqués par Schöner lui-même, des hommes de son Einsatz Kommando et par l’équipe résidente de Wald Fest (peut-être que Arnaud Baratchart, capturé grièvement blessé au Lac de Maix, voire d’autres hommes, ont subi pour les mêmes raisons le même sort)

Témoignages, à lire ou écouter :
- Documents PDF ci dessous dont Les "Hommes du 18 août" exécutés au Struthof

- Struthof 31 août 2014, l’exceptionnelle commémoration du massacre de la nuit du 1er/2 septembre 44. Cliquer
- Récit d’un témoin du massacre (Radio France, extrait du dossier spécial d’Olivier Vogel réalisé en 1995). Nota : ce dossier n’est maintenant plus en ligne et il est nécessaire d’en acquérir le DVD. Cliquer pour en savoir plus  [15]

Un peu plus de 10 hommes sont libérés après quelques jours [16]

Tous les autres resteront enfermés à Schirmeck et seront déportés un peu plus tard en Allemagne [17]

A noter que la 6ème centurie du GMA Vosges dirigée par René Valentin - la "Centurie de Moussey" - se retrouve saignée à blanc... et pour cause (noyau dur du parachutage du 13 août). Ses quelques "non capturés" intègreront une nouvelle "Centurie de Moussey", formée quelques jours plus tard autour du lieutenant du Génie Jean Granjon (chef du "chantier forestier" installé depuis 1 an à Moussey), attachée au 1er RCV FFI du colonel Emile Marlier]]


La déportation du 18 août est la première des 3 vagues d’arrestations de masse de la vallée du Rabodeau [18]. Elle engloutit une centaine d’hommes dont plus de la moitié sont de Moussey, une trentaine des villages voisins, une quinzaine du haut de la vallée de la Plaine, et 4 parachutistes Anglais [19]

Elle n’étouffe cependant en rien la détermination de l’état-major allié, ni celle des hommes d’ici. Le GMA Vosges élargit son recrutement dans la vallée de la Plaine. Le colonel Marlier continue de renforcer le 1er RCV FFI et restructure la haute vallée du Rabodeau autour du 1er bataillon (dit aussi 3ème) qu’il confie au garde général des Eaux et Forêts Denis Fondeur... Et les parachutages reprennent ici 2 semaines plus tard, plus massifs encore en hommes du SAS et armement que celui du 13 août

La contrepartie en sera le renforcement proportionnel de la détermination allemande à tout entreprendre pour anéantir la Résistance d’ici et ne pas se faire "ronger" de l’intérieur... L’opération Wald Fest va donc battre son plein [20]. Et les arrestations, perquisitions, exécutions, rafles, ne feront plus que se multiplier au fil des jours. Elles dureront jusqu’au 22 novembre, date de l’arrivée de la 100ème division d’infanterie US dans la vallée : la Libération [21]

La déportation du 18 août [22] n’est ainsi que le début d’une implacable et longue traque. Son point culminant sera les 2 gigantesques "rafles antiterroristes" et déportations du 24 septembre puis des 5 et 6 octobre, suite logique [23] . Le tableau présenté dans la rubrique Bilan humain résume la "facture globale" : la vallée du Rabodeau devenue "la vallée aux 1 000 déportés" ! Cliquer


Notons ici, en appui du rapport Barkworth/Missing Parachutists (qui n’est qu’une première synthèse, panoramique mais toutefois étonnamment précise) , l’utilité des rapports et "journaux de bord" personnels des parachutistes anglais dans la compréhension du contexte, la précision des faits et le "nettoyage" des légendes. Ces derniers documents ne sont pas et n’ont pas à être pour l’instant publiés ici

Notes :

[1] La réunion du 24 août à la Kommandantur d’Epinal, présidée par le général von Kirchbach, a pour but "d’industrialiser" le plan d’action décidé oralement quelques jours plus tôt, et effectivement démarré ici le 16 août. Détails dans document PDF de bas de page "Directive allemande... "

[2] Dès après ce décret et une halte à Strasbourg, Himmler se rend à Gérardmer, villa Chevalier, les 5/6 septembre. Il a réuni là les chefs d’état-major de la Wehrmacht (généraux Blaskowitz du "Groupe G", Seeger de la 405ème division de Protection, Oberg venu de son point de repli de Nancy, von Kirchbach venu d’Epinal... ) et de la SS et vient imposer son plan de maintien "à tous prix" du front, maintenant à seulement quelques kilomètres

[3] Autour de "l’opération Walkyrie" :
- Ce film documentaire. Cliquer
- Développements sur Wikipedia. Cliquer

[4] Rappelons que cette opération "Waldfest" ne se restraint pas aux seules vallées Ouest du massif du Donon, mais englobe tout le massif des Vosges. Son cadre général est résumé dans La libération de l’Alsace septembre 1944 - mars 1945 d’Eugène Riedweg. Cliquer

Pour rester précis à propos de ce que recouvre sa dénomination dans les vallées Ouest du massif du Donon on considère généralement 2 étapes :
- L’opération "du 18 août", appelée "Plainetal" par certains, qui démarre le 16 août et est menée par le BDS Alsace-Bade contre le GMA Vosges, principalement "logé" dans la vallée de la Plaine. Cette première opération d’envergure, menée par le seul BDS Alsace-Bade, est généralement englobée dans l’appellation Wald Fest
- L’opération strictement dénommée "Wald Fest" dans le rapport Barkworth/Missing Parachutists *, qui démarre le 1er septembre et est destinée à "nettoyer" l’ensemble du territoire couvert par l’Opération Loyton. Son étendue et les moyens mis en oeuvre font que sont mis en jeu les 2 BDS : BDS Alsace-Bade sous la coupe du Dr Isselhorst et BDS France sous la coupe du Général SS Karl Oberg. Cette 2ème opération est en fait une extension de la précédente, elle se décompose souvent en 2 étapes dans les "écrits" : Wald Fest 1 pour les actions de septembre, Wald Fest 2 pour les actions d’octobre à la libération du secteur
- Dans les faits et sur le principe ces opérations ne relèvent que d’une même décision, mûrement réfléchie, calculée et menée sur le long terme : le renforcement des défenses allemandes et la mise à genoux de la résistance du secteur. Et c’est Erich Isselhorst qui en est de fait le "patron", les raisons de sa condamnation à mort et son exécution illustrent le propos

* Le rapport "Missing Parachutists" est le document original de l’enquête dirigée par le major Eric Barkworth et menée par son équipe sur le terrain pour connaître les conditions de la "disparition" des parachutistes de Loyton, implicitement des arrestations-déportations ou exécutions des "civils" de nos vallées concernés par l’Opération Loyton, et d’en traduire les impliqués devant la justice. Une base historique incontestée. Des extraits ici (1er document PDF de la page "L’Action Wald Fest... ). Cliquer

Le nom précis de cette mission est "2 SAS WCIT" (2nd SAS War Crimes Investigation Team). La place occupée par celle-ci dans le SAS War Diary. est tout un symbole. Cliquer

[5] 3 faits notables se sont produits la veille, 16 août : 1/ Le général von Kirchbach et son état-major (et logiquement pas Seeger) viennent s’installer sur place (Allarmont, hôtel de l’Arbre Vert), appuyés de forces de la Feld Gendarmerie de Saint Dié 2/ La garnison du Donon forme des "commandos de chasse" 3/ Un groupe motorisé d’Allemands s’arrête à la gendarmerie de Moussey, puis prend au bout d’une 1/2 heure la direction du Hantz (il s’agissait en fait d’hommes du Kommando Schöner venant de Raon l’Etape renforcer l’équipe de "permanents" du SD du château de Belval *)... Les dispositions étaient donc prises en vue de faire face à un "travail" de grande ampleur, préparé, prévu d’être réalisé à court terme. Constatons par ailleurs qu’on ne monte pas une opération d’une telle importance sans avoir préalablement disposé de renseignements circonstanciés et à jour... !

* Le château de Belval, centre de formation des apprentis et personnels des Ets Laederich (centre de loisirs pendant les périodes non travaillées), a été réquisitionné à plusieurs courtes reprises pour héberger des cadres allemands. Il l’est cette fois ci pour servir durablement de QG du Sipo/SD, cousin de la "Maison Barthélémy" de Saales, autre officine locale des interrogatoires, centre de transit vers le camp de Schirmeck, lieu de décision d’exécutions "urgentes" à effectuer localement (il y aura aussi "la Crèche" de Raon l’Etape, "l’école du Vivier" d’Etival-Clairefontaine... )

[6] L’organisation de l’opération :
- Le "patron" est le docteur en droit Erich Isselhorst, basé à Strasbourg et chef du BDS Alsace-Bade
- La direction opérationnelle est installée dans un bureau du camp de Schirmeck
- Son "manager" principal est le Lt colonel SS Wilhelm Schneider, délégué de fait de Erich Isselhorst. Il est assisté de Julius Gehrum (homme du Renseignement), de Alphonse Uhring (lien direct avec le RSHA, ancien commissaire principal de la PJ en Alsace avant guerre !)... Un état-major conséquent et des Einsatz Kommandos spécialisés assurent l’exécution
- Erich Schöner et son Einsatz Kommando (BDS Alsace-Bade) viennent de Raon l’Etape prendre place le 16 août au château de Belval, directement sous les ordres de Wilhelm Schneider. Ils y resteront jusqu’au 28, date de conclusion de "l’affaire du 18 août" proprement dite (pour la suite ce sera Teufel)
- La Feld Gendarmerie de Saint Dié apporte sa connaissance du "terrain au quotidien", elle fera partie du QG d’Allarmont
- Les troupes de la Wehrmacht commandées par le général von Kirchbach sont à cette période partiellement affectées au "maintien de l’ordre". Erich von Kirchbach, grièvement blessé le 28 septembre lors des combats de Grandvillers (88) mourra à l’hôpital de Saint Dié le 2 octobre (archives Wehrmacht). La 405ème division de Protection commandée par le général Seeger est principalement affectée aux opérations de chasse contre les maquis, en coordination avec les Einsatz Kommandos des 2 BDS. Willy Seeger, condamné en 1946 pour crimes de guerre, est mort dans son lit en 1981
- L’énorme cohorte des supplétifs français maintenant aussi repliée ici et de fait en situation de "chômage technique" profite de l’aubaine pour offrir ses services à n’importe quel prix, le PPF collabore. Ils ne décevront pas leurs employeurs
- Un co-directeur opérationnel, au moins "sur le papier", sera un peu plus tard le général SS Carl Oberg, chef suprême des polices de sécurité France. Son adjoint et exécutant sera le Lt colonel Suhr, devenu chef du BDS France en remplacement de Helmut Knochen disgrâcié. Repliés à Nancy mi août puis ici mi septembre, ils installeront en effet leur PC à Fraize Plainfaing (jusqu’au 8 novembre)

Pour en savoir plus sur l’opération Wald Fest en général, se reporter à l’article dédié L’Aktion Wald Fest. Pourquoi et comment. Cliquer

[7] Pour être plus précis sur ce lieu "fontaine des Colas Lorrains" : il est situé au centre d’un rectangle délimité à l’Est par une ligne "route de Prayé"/"Poteau 41", "sentier du 4 X", "Haut du Bon Dieu", "Lac de la Maix", Vexaincourt, à l’Ouest par "route de Prayé"/"Pont de Pierre", "Jardin David", "route forestière de la Haute Côte", "Les Marcassins", Allarmont. Ce centre, un grand plateau, domine à cet endroit la chaîne de montagne qui descend de Prayé-Donon au Nord-Est vers Moyenmoutier-Raon l’Etape au Sud-Ouest. Ce plateau est à mi distance des vallées de la Plaine et du Rabodeau. Traversé dans sa largeur par un impressionnant maillage de chemins, il permet de relier tous points des villages de la vallée de la Plaine, du village de Moussey et tous ceux de la vallée du Rabodeau. Traversé dans sa longueur par une ancienne voie romaine de crête, à cet endroit parallèle et à quelques mètres au-dessus de l’actuelle "route des Bannes", et par une multitude voies parallèles. Il permet de relier la région de Moyenmoutier-Raon l’Etape (ouverture vers Saint Dié, Rambervillers, Epinal, Nancy... ) à celle de Prayé-Donon (ouverture vers Sarrebourg, la vallée de la Bruche et Strasbourg ou Sélestat... ). Un exceptionnel noeud de communication placé "en sommet" et disposant d’une source, un endroit stratégique donc, déjà compris et mis à profit comme tel par l’état-major allemand de 14-18. La consultation d’une carte d’état-major finira d’éclairer le propos

[8] Le repli de ces hommes sur les hauts de la vallée du Rabodeau a été parsemé d’incidents. En témoigne cet épisode concernant l’équipe de Marcel Hagenauer : il y perdra la vie, le jeune Farques sera ratrappé... Voir document PDF de bas de page

[9] On peut estimer que la "vraie" liste utilisée par les Allemands au moment des arrestations comportait une centaine de noms, en tous cas qu’elle a eu pour conséquence de permettre d’arrêter ceux qui les portaient

Elle semble en toute logique ne pas être précisément "l’ordre de bataille" de la 6ème (aussi dénommée 5ème) centurie du GMA, dite "de Moussey". Celui-ci reconstitué après guerre par l’abbé Gasmann comporte 69 noms (52 de Moussey, dont la plupart n’ont été "inscrits" au GMA qu’après guerre !... ) et 17 des villages voisins des vallées du Rabodeau et de la Plaine. Notons que la composition de celle ci est incomplète : la majorité des noms inscrits est effectivement celle d’arrêtés lors de "l’affaire du 18 août" et de présents au parachutage du 13 août... mais s’y trouvent les noms d’hommes ayant eu peu de liens directs avec les évènements du moment, ne s’y trouvent pas des hommes qui en ont ou en ont eu, et il y manque des noms (voir cette liste dans document PDF ci dessous dénommé "La liste oubliée")

La liste réellement exploitée par les Allemands est en toute vraisemblance une liste "consolidée", établie sur la base de leur cueillette de renseignements : ceux trouvés dans les sacs des officiers de l’état-major du GMA et ceux d’autres sources diverses dont celles obtenues au cours des interrogatoires (la plupart sous la torture)

L’important est de retenir que des noms sont tombés dans les mains des Allemands, et que peu des hommes qui les portaient étaient de retour à la maison en 1945

[10] 11 hommes du Génie forestier sont "épargnés" (au moins pour un temps) le 19 septembre, jour du transfert Moussey Belval. Illustration parmi d’autres de la "pointure" du lieutenant Granjon et de sa sollicitude envers ses hommes). L’original scanné du "laisser-passer" figure dans document PDF de bas de page

[11] René Valentin s’est "dénoncé" lui-même pour stopper la tournure de plus en plus dangereuse pour la population du village des recherches menées à son encontre. Respect

[12] L’opération des 16/17/18 août et jours suivants est conduite principalement, pour la partie police par le Einsatz Kommando SD de Erwin Schöner (BDS Alsace-Bade) venu spécialement de Raon L’Etape, pour la partie militaire par des détachements de la Wehrmacht affectés au général von Kirchbach, patron de la Wehrmacht du secteur basé à Epinal, le "ratissage" en forêt principalement effectué par des hommes de la 405ème division du général Seeger, les investigations dans les villages de la vallée de la Plaine par la Feld Gendarmerie de Saint Dié et les Einsatz Kommandos présents sur place

[13] Précisions apportées par Liliane Jérome début 2019 :
- Paul Lucas ayant réussi à s’échapper de son groupe sous les rafales, les "fusillés de la salle des Pompes d’Allarmont" ne sont donc réellement que 9 et non 10 comme cité depuis près de 75 ans
- Maurice Parisse est bien le "Maurice Receveur, jeune homme d’Allarmont (18 ans) capturé le 17, retrouvé 9 jours plus tard la poitrine trouée de balles et sans tête" indiqué dans la presse de l’époque. C’est sous ce nom qu’il avait originellement été inscrit sur le registre d’état-civil

[14] Des 4 parachutistes Anglais capturés dans l’opération 3 seront exécutés et 1 gardé prisonnier :
- Sgt Lodge/Friedlander (2ème SAS) : capturé dans l’attaque et exécuté sur place dans les bois de Moussey, son corps amené au village et inhumé par le curé Gasmann dans le cimetière communal
- Sgt Davis (F Phantom) : replié après l’attaque et redescendu jusqu’à Le Mont, signalé au SD du château de Belval par le curé de Saint-Jean du Mont (commune de Le Saulcy) auprès duquel, quasi mort de fatigue et de faim, il était venu demander secours. "Pris en charge" par ce même SD, interrogé puis conduit "sur les lieux". Refusant de "parler", il a été exécuté près du "Calvaire" (bois de Moussey). Son corps sera retrouvé par Albert Freine au printemps 45
- Pct Wallace Hall (2ème SAS) : capturé blessé dans l’attaque, descendu à Vexaincourt puis conduit au camp de Schirmeck, jamais revu après son "chargement" dans un camion quittant le camp vers la route du Struthof, son corps ne sera jamais retrouvé (a en toute logique été exécuté "en chemin" et son corps brûlé dans le crématoire du Struthof : "emmené de Schirmeck vers le Struthof et n’ayant jamais réapparu" indique avec de solides raisons le rapport Missing Parachutists
- Sgt Seymour (SOE Jed Jacob, transmetteur radio) : abandonné par ses porteurs locaux (cheville brisée lors du parachutage en touchant le sol), à cours de munitions et capturé dans l’attaque, amené et interrogé au camp de Schirmeck puis dans de successives geôles du SD. Retrouvé, très amoindri mais vivant, dans un camp de répression en Allemagne, il est le seul survivant des 40 parachutistes britanniques capturés de l’opération Loyton

[15] En voici un court résumé. Le témoin, Max Nevers, est un détenu de la cuisine du camp qui a apporté dans la salle d’exécution du crématoire le café chaud réclamé par l’équipe des exécuteurs. Ce qu’il a pu voir en traversant la salle (bien que et pour cause faisant à la fois vite et celui qui ne regarde pas) : des pendus aux crochets du plafond, des morts en désordre par terre, des hommes serrés l’un contre l’autre visiblement en attente de leur tour, du sang partout... au milieu de tout cela des SS qui s’agitent en grognant, en partie débraillés... Rappel : dans ce même endroit du "block crématoire", cette même nuit, seront en fonction des moyens et du temps disponibles pendus ou abattus d’une balle 141 résistants : 106 (dont 15 femmes) du réseau Alliance et 35 du maquis d’ici

[16] A priori 12 selon document de René Stouvenel (voir document PDF de bas de page : les 13 derniers noms de celui-ci). C’est l’intervention auprès de Karl Buck de MLL, gardienne du camp apparentée à l’un d’eux, qui a permis cette libération

[17] 34 selon document de René Stouvenel. Voir document PDF de bas de page : les 34 premiers noms de celui-ci

[18] A noter que, en plus, près d’un millier de personnes de la vallée du Rabodeau seront "requises" à partir d’octobre. Les uns (plusieurs dizaines, Robert Wantz en était) pour "assister" les Allemands de la Wehrmacht ou de l’OT (organisation Todt) dans la manutention ou le transport de leurs propres matériels et le transport vers l’Allemagne des biens réquisitionnés (et volés) dont beaucoup de bétail et d’attelages. Le plus grand nombre (plusieurs centaines) pris le 8 novembre, les uns pour travailler "sur place" à la fortification du "Schutzwall West", les autres transportés pour travailler dans les usines et services d’Allemagne (Mannheim et sa région principalement). L’impact se ressentira principalement dans le secteur Moyenmoutier et villages environnants (le même "système" fonctionnera dans les secteurs contigus (Raon l’Etape, Etival, Saint Dié... ), et ailleurs. Voir document PDF de bas de page

[19] Une trace de ces hommes dans les données de la FMD (liste des hommes enregistrés au camp de Schirmeck). Notons que cette liste n’est pas tout à fait complète et comporte des erreurs. Cliquer

[20] Une mention toute particulière sera bientôt à attribuer au "Kommando Ernst" (voir document PDF dans rubrique "La Chasse à l’homme... "). Replié d’Angers, où il a été responsable de plus de 8 000 arrestations, il devient, avec le Kdo d’Erich Wenger, un fer de lance de l’opération Wald Fest ici. Sa redoutable efficacité permettra d’allier Einzatz Kommandos et supplétifs Français, Feld Gendarmerie, Wehrmacht... pour infitrer les réseaux comme pour mener rondement les rafles et déportations du 24 septembre dans les villages du haut de la vallée. Puis celles des 5 et 6 octobre à Senones et Vieux Moulin, renforcé là d’hommes d’un détachement du Kdo Wenger installé sur place, ainsi que du détachement de Celles sur Plaine du Jagds Kommando de Helmut Retzek

Quant au "Kommando Knab" (un détachement replié ici du SD de Lyon dont Werner Knab était le "patron"), il participera aux rafles de travailleurs forcés de Moyenmoutier et environs en même temps qu’au saccage et pillage de la ville du 9 novembre jusqu’au jour même de la Libération. (2 bio sommaires du Dr Werner Knab : 1/ Cliquer 2/ Cliquer )

[21] Libération de la vallée du Rabodeau par la 100ème division d’infanterie US. Son histoire. Cliquer

[22] Sur la déportation du 18 août, en plus des documents joints ci dessous, voir dans rubrique Récits de rescapés les témoignages de Jean Vinot, Bernard Py, Aimé Vigneron... dans rubrique Témoignages/Faits et hommes d’ici le récit de Raymond Benoit intitulé La Résistance à Le Saulcy-Quieux...

[23] Le contexte a en effet rendu inévitables ces 2 rafles et déportations de masse du 24 septembre puis des 5 et 6 octobre. Ne réussissant pas à désorganiser les rouages ni capturer les chefs significatifs (ou faire "parler" assez les capturés) par des moyens "classiques", les Allemands se sont résolus à utiliser la solution radicale de la déportation des hommes valides des villages... Comment faire en effet plus efficace pour "domestiquer la population" et "exterminer cette préoccupante bande de terroristes" (traduction de rapports allemands)

Ces 2 autres déportations, les 2 "grandes" déportations comme on les nomme ici, font l’objet d’un article éponyme à part, placé dans la rubrique Histoire d’ici. Cliquer

 

Galerie d'images

Le château de Belval Opération dite du 18 août Opération dite du 18 août Opération dite du 18 août Déportation du 18 août Opération dite du 18 août Opération dite du 18 août Les "Hommes du 18 août" exécutés au Struthof. Mise à jour Crématoire du Struthof. Rappel de "La nuit du 1er au 2 septembre (...) Erwin Schöner Erich Isselhorst Willy Seeger Erich von Kirchbach
 

Documents joints à l'article

Directive allemande du 25 août 44
PDF | 248.8 ko | document publié le 16 octobre 2008
Prémices de l’opération "Wald Fest"
Moussey. Arrestations et Déportation du 18 août 44
PDF | 1.9 Mo | document publié le 6 novembre 2008
Témoignage de J. P. Houel
Opération du 18 août
PDF | 213.6 ko | document publié le 30 décembre 2009
Rapport des RG
Arrestations et Déportation du 18 août
PDF | 257.5 ko | document publié le 8 mars 2010
Les gendarmes de Moussey
Le Château de Belval
PDF | 1.6 Mo | document publié le 9 octobre 2011
Siège du Sipo/SD
Maurice Fister
PDF | 1009.3 ko | document publié le 25 août 2013
Mort sous la torture au camp de Schirmeck
"L’Affaire du 18 août" 44
PDF | 624.4 ko | document publié le 10 avril 2014
La "liste oubliée" + Georges Evrard + 6ème centurie
Les "Hommes du 18 août" morts à Schirmeck et exécutés au Struthof
PDF | 1.7 Mo | document publié le 8 octobre 2014
Le "Mur des visages"
Les "Hommes du 18 août" exécutés au Struthof
PDF | 877 ko | document publié le 3 mars 2015
Leur départ du camp de Schirmeck, soir du 1er septembre 44. Témoignage
Réquisitions de main-d’oeuvre de novembre 1944
PDF | 115.6 ko | document publié le 10 janvier 2017
Ordre de réquisition du 4 novembre (document source Liliane Jérome)
Les 11 hommes du Génie forestier épargnés
PDF | 4 Mo | document publié le 24 juillet 2018
Le laisser-passer de Fischer
Vallée du Rabodeau. Affaire du 18 août 1944
PDF | 330.5 ko | document publié le 24 juillet 2018
Les hommes déportés vers Gagguenau (1ère étape... )
Vallée du Rabodeau. Affaire du 18 août 1944
PDF | 329.5 ko | document publié le 24 juillet 2018
Les hommes relâchés de Schirmeck le 24 août
Vallée du Rabodeau. Affaire du 18 août 1944
PDF | 1.7 Mo | document publié le 25 juillet 2018
La mort de Marcel Hagenauer
"L’Affairedu 18 août 44"
PDF | 1.2 Mo | document publié le 9 août 2018
Implantations des Einsatz Kommandos du SD
Les "Hommes du 18 août" morts à Schirmeck et exécutés au Struthof
PDF | 2.3 Mo | document publié le 10 avril 2019
En fait ils étaient 35 + 4 + 1. Explications
"L’Affaire du 18 août 44"
PDF | 114.5 ko | document publié le 10 juillet 2019
Liste des morts

Rubriques du site

1.Introduction
Infos pratiques
Le Maquis que l’Histoire avait oublié
Pourquoi ce site
2.Orphelins de Déportés
3.Histoire d’ici
1 - Le Vosgien d’ici en 1940
2 - Le contexte général
3 - Ce qui s’est passé ici
- 1940
- 1941-1943 et suites
- 1944
Les 2ème et 3ème - les 2 "grandes" - déportations de 44
4 - Bilan humain. La vallée aux 1000 déportés
5 - Les SAS ici
- L’Opération Loyton
- La Mémoire
- Le prix payé
- Témoignages des hommes
6 - In memoriam
- Commémoration des 3 Déportations de 44
- Hommage à la Résistance d’ici, gens du Rabodeau et parachutistes Anglais
- Lieux de Massacres et d’Exécutions sommaires
- Moussey Le Mont 6 juin 2010. Le 13ème Dragons saute sur "Anatomie"
7 - Notes
- Notes
- Voir aussi
- Chants et Poèmes de la Résistance
- Découvrir la vallée du Rabodeau
8 - Brochure-Résumé
9 - Explications. Réflexions
4.Liens
5.Témoignages
La vérité remise à sa place. 13 publications significatives
Le film documentaire "Nazis Hunters. Justice SAS Style"
Les Résistances. Témoignages filmés
Les Résistances. La Désobéissance est le plus sage des Devoirs
Témoignages. Faits et hommes d’ici
Témoignages. Faits et hommes dans les camps
6.Ecrits de rescapés
1 - Marius Schmit
2 - Roger Leboube. Collectif de 8 rescapés
3 - Marcel André
4 - Aimé Vigneron
5 - Marcel Dolmaire alias Marcel Dejean
6 - Jean Vinot
7 - Abbé Paul Parguel. Prêtre résistant déporté
8 - MD. Réflexions sur ce qu’auraient pu être...
9 - Albert Fäh. L’odyssée des maquisards de Grandrupt
BP - Docteur Bernard Py
LR - Louis Receveur. Déporté à Dachau
7.Le dernier mot
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